M’enfuir vers moi-même
Les gonds du Temple
Des bâtisseurs insatiables
M’ont reconnu, et ont crié:
Dehors! Dehors! Dehors!
Et moi brisé, les yeux lourds,
Épuisé, je m’en sors
Et je titube, hésitant
Vers la lumière oubliée
Plus de quelques marches
Quelques chutes, faux-pas
Et je sens l’infernal pavé,
Dur, noir, gris, rayé
Le damier sombre
Des chus et damnés
La nuit retombée sur ma vie
Sur ma ville exténuée,
Trouée de mille laideurs nouvelles
Chargée de futurs inhumains
Je me souviens d’autres jours,
Et je te redemande le chemin
Celui du retour vers mon cœur de feu
Je te supplie : un mot, une parole,
Un bruit, un signe : une direction !
Je scrute à en tomber, les cercles
Serrés de tes rouleaux millénaires
Ce faisceau de fils du temps,
Ces sillons de pleurs et de gloire,
De vies croisées et par là sauvées
Et mon cœur - si longtemps ignoré
Se prépare à exploser une dernière fois
Mais rien.
Me laisseras-tu en cette heure vide et morne,
Aux creux d’un temps inversé et injurieux,
En cette heure sourde et noire,
Loin encore des chants de l’aube ?
Sans un rai d’espoir, encore à comprendre
Ni un signe de sagesse, à ne plus nier ?
Je referme, écrasé et douloureux, le Livre Sacré
Mon stylo noir, mordillé et luisant de salive,
Reste coincé entre deux psaumes revêches
Je rouvre ta Parole, pour l’en dégager,
Et m’en aller tenter dormir, ou mourir
La nuque cassée, j’ai encore tout juste le souffle
De lire, O Toi, Refuge de qui T’appelle,
Sous la pointe de mon calame prisonnier :
Ce chemin neuf accordé, ce nouvel Incipit :
« Chantez au Seigneur un cantique nouveau!
Faites retentir vos instruments et vos voix! »