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Lettres chères

Petites rivières de sens,
Encrées dans l’infini des mots

Vos abîmes noirs me lancent
En silence, à mes yeux mi-clos

Racines puisant aux fonds
Perdus, de siècles entassés

Où gisent drames sans noms
Brillent bonheurs clairsemés

Vous, les mots de l’Ancien
Parures de récits indicibles

Vous liez de mille liens
Esprit-langue mis au crible

Enchainements secrets
Chaînes sacrées de nos rouleaux

Vos traits de geais, de craie
Décrets de gloire en nos préaux

Volutes tant griffées
Par les morsures de la vie

Sur les bancs des accusées
Chairs et volumes de l’âme meurtrie

Les temps ont adouci
Vos cris sanguins de victoire
Les mots doux ont failli
Mourir dans les creux de l’Histoire

Sombres pointes de gloire
Des poètes sont morts sur vos piques

L’on forçat à vous croire
Or, vous n’étiez que voiles épiques

Ôtant la vue aux sages
Perdant la raison des moins fous

Et vos muets ramages
Mènent les mondes à croix et clous

Beaucoup se sont perdus
En vos océans intérieurs

Crédos, lus et relus
Des durs athées, leurs pairs crieurs

Pures condamnations
Tempêtes de rages feintes

Piloris, déraisons
De zélotes, d’âmes contraintes

-

Arcs aux myriades de feux
Sauvez-moi donc de leur dédale !

Mes yeux ne sont que deux
A trébucher sur leur scandale

Je prie donc le Très-Haut
L’Astre peignant de mille couleurs :

Aie pitié de Ton sot,
Descelle-le de ses douleurs !

Donne à chaque jour le ton
De Ta divine enharmonie

Et laisse tonner le son
Glorieux, de Ton Amour honni

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