On est fort peu de chose
On est fort peu de chose,
Bien petits, et pour cause
Des créatures sans nombre,
A très peu portons ombre
Je vais l'ici montrer
Par exemples illustrés
Prenons la baleine blanche
Qui en la mer s'épanche,
Jets jaillissant des flots
Son petit est bien gros,
Au point qu'il nous dépasse,
En taille, comme en masse
Et pourtant, tous les deux
Echangent chants heureux
Voyons l'aigle qui vole,
Plus haut que sauts d'école
Ses ailerons étendus,
Nos bras paraissent menus
Et, à quelle grande vitesse,
Ses faibles proies agresse !
Même nos meilleurs coureurs
N'arriveraient point à l'heure!
Considérons aussi,
L'énorme éléphant gris
Qui, par de belles dents,
Qui pointent en se courbant,
Arrive à arracher
Arbres enracinés
Battant tous les records
Des bûcherons les plus forts
Face à de tels talents,
Des êtres bien plus grands,
Tournons-nous pour la suite
Vers créatures petites
Si humbles, qu'à nos yeux,
Elles ne valent guère mieux
Que les cailloux qu'on foule,
Sur qui nos gros pneus roulent
La fourmi, par exemple,
Qui, pour bâtir son temple,
Charrie par monts et vaux
Les morceaux les plus gros
Elle empile et construit
Sous les pierres son nid
Il faut bien qu'on admette
Sa maîtrise bien nette
De l'art du bâtiment,
Des mélanges de ciment!
Le ver de terre, aussi,
Sans cesse creuse son nid
Qu'il semble avoir perdu,
Car, jamais il n'est repu
De forer longs tunnels,
Aérant radicelles
De percer moult canaux,
Par où plantes boivent eau
Les microbe,s par ailleurs,
Souvent font nos malheurs
Mais - maladies à part -
Ils sont versés dans l'art
De transmuter la pâte
Des fromages que l'on tâte
D'hâter la digestion
Des gnous et des bufflons,
Vertus certes invisibles,
Mais tout sauf nuisibles
Tout ceci, pour vous dire
Que, pour sa taille élire,
Tel grand, ou tel petit,
C'est avoir mal compris
Parabole des talents,
Qui comble petits et grands !
Car, nature nous donne
Qualités bien bonnes
Qui n'ont rien à voir
Avec le marquoir,
Où le médecin note
La précise cote,
De la tête aux guêtres,
De nos centimètres
C'est bien plus à Dieu,
Miséricordieux,
Que nous redevons
Tant de gratuits dons
Elan généreux
Qui nous rend heureux !
Peut-être qu'Il veut dire
A nos si grand sires:
"Vous qui êtes si aise
De frôler les cimaises
De vos basses masures,
Même sans vos chaussures
Qui, de haut, toisez
Ceux qui - mal payés -
Pour un toit, un sou
Rangent tout chez vous
Vous, qui n'avez cure
De la vie plus dure
Que doivent endurer
Ceux qui - ainsi nés -
Non pas pu grandir
Héritiers d'empires:
Au lieu de l'orgueil
Faites dons, accueils,
Laissez donc de tout
Aux petits chez vous !
Eux aussi méritent,
De façon gratuite,
D'être un peu choyé
Par Ma gente bonté.
Ne vous mettez pas
En travers de Moi !
Car, je prends et donne
Et toujours Je pardonne,
Au faible qui chute.
Rien tant me rebute,
Qu'un grand, ou qu'un fort,
Aux petits fasse tort.
Ne vous perdez pas
- Larmes d'ici-bas -
En vaines querelles,
Guerres éternelles !
Ne gâchez vos vies
Par brûlure d'envie,
Soyez contents,
Soyez aimants !
Glaives acérés
En charrues fondez!
Rompez châteaux!
Relevez hôpitaux!
Faites au plus tôt
Pacte d'amitié:
Tous, serez bientôt,
De votre bonté,
Au ciel, tout là-haut,
Récompensés!"
Dimitri Arnauts
Le 13 Octobre 2010